Par Matthew Schorr
Edité par Tomás Gimenez and Wendy Guzman
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Une étude sur l’histoire du football au Brésil révèle que le football est intimement lié à la société brésilienne. Quand les britanniques ont introduit le football au Brésil en 1894, il était impossible de prédire que le foot deviendrait un aspect important de sa culture. Toutefois, pendant les décennies suivantes, le football est devenu le passe-temps national, presqu’une religion, et les footballeurs brésiliens ont créé un style de jeu distinctivement brésilien et différent de ses équivalents à travers le monde (joga bonito). Par conséquent, le Brésil fut très fier quand la FIFA le désigna comme pays organisateur de la Coupe du Monde de 1950, seulement 56 ans après le premier match de football au Brésil.[1] Quel honneur ! Il semblait qu’il n’y avait pas de candidat aussi méritant pour organiser la compétition. Tout le monde reconnaissait le talent de l’équipe brésilienne, et ses supporters anticipaient avec confiance une victoire brésilienne. Beaucoup de citoyens ont célébré la victoire avant même que le match final ait eu lieu.[2] Cette outrecuidance était une grande erreur. Au grand regret du Brésil, l’équipe brésilienne fut vaincue à domicile et dans le plus grand stade du monde par l’Uruguay, son voisin comparativement minuscule. Le peuple brésilien était abattu : le pays entier voulait regarder la réussite de son équipe, et il n’était pas préparé à une défaite. Le Mondial de 1950 préoccupera sans doute les Brésiliens pendant le tournoi cet été, mais, étant donné l’humiliation et la douleur de 1950, c’est improbable que les Brésiliens voudront en parler , même du 7-1 chez eux en 2014. (Les médias ont commencé à appeler cette défaite du 2014 “l’Mineirazo.”) Les défaites chez eux sont toujours des sujets de conversation que les brésiliens préfèrent ne pas avoir. Néanmoins, pour vraiment apprécier la signification du Mondial de l’été passé, il faut que les étrangers comprennent le Mondial de 1950 et son influence sur le psychisme brésilien.
La Confiance débridé
Le peuple Brésilien attendait avec impatience le match final entre le Brésil et l’Uruguay. Le fait que c’était le premier Mondial après une interruption de douze ans, provoquée par la Seconde Guerre mondiale, contribuait aussi à l’anticipation.[3] L’équipe uruguayenne avait des réussites; elle a notamment gagné les jeux olympiques en 1924 et en 1928, en plus du Mondial inaugural de 1930.[4] Bien que l’équipe uruguayenne fut formidable en 1950, l’équipe brésilienne était reconnue comme supérieure,[5] et les brésiliens croyaient en la capacité de leur équipe de gagner son premier championnat. En fait, bien que le match final n’avait pas encore eu lieu, le maire de Rio et de nombreux journaux ont annoncé le Brésil comme vainqueur.[6] Jules Rimet, président de la FIFA et fondateur du Mondial, avait même déjà préparé un discours de félicitation pour le Brésil.[7] Il semblait que leur envie de triomphe étaient logique : l’équipe avait gagné ses deux derniers matchs sans difficulté ; l’attaquant Ademir avait déjà marqué huit buts dans le tournoi, un record impressionnant qui dura jusqu’à 2002 ; et les adversaires étaient effectivement incapables de marquer des buts contre le gardien Moacir Barbosa.[8]
Le Maracanã
En plus, il semblait naturel que le Brésil doive triompher sur son propre terrain , devant les 200000 supporters brésiliens dans le stade Maracanã, le plus grand stade du monde.[9] Le Maracanã fut construit spécifiquement en préparation du Mondial de 1950.[10] L’objectif était de construire un stade qui témoigne de la réussite du football brésilien et de la victoire de l’équipe nationale. En pratique, le Maracanã fut construit pour servir de temple du football brésilien. À cause de l’énormité du stade, l’Etat a pris du retard dans sa construction, et beaucoup de gens avaient peur qu’il ne soit pas prêt pour la finale. Cette histoire du Maracanã fut comparable à celle des stades que l’État construisait en préparation du Mondial l’été passé.[11] Quoique la construction du Maracanã ne fut complètement achevée en 1965, le stade ouvrit ses portes pour un match amical entre Sao Paolo et Rio une semaine avant le Mondial de 1950.[12] Malgré le fait que l’échafaudage restait sur place pour supporter le plafond, le Mondial se déroula comme prévu dans le Maracanã.[13]
Offert par Leandro Neumann Ciuffo.
Le Maracanã
Le Match
Après une longue attente, le match final a eu lieu le 16 juillet 1950.[14] Après la première moitié sans but, Friaça, attaquant brésilien, marqua à la 47ème minute.[15] Il semblait que la victoire était entre les mains du Brésil.16] Pendant la 66ème minute, l’attaquant uruguayen Juan Schiaffino a marqué un but pour égaliser le match.[17] Pas d’inquiétude—une égalité est tout ce dont le Brésil avait besoin pour gagner le championnat. Malheureusement pour eux, un autre attaquant uruguayen, Alcides Ghiggia marqua la 79ème minute.[18] L’Uruguay prit l’avantage sur le Brésil. Le Maracanã devint silencieux, et les 200000 spectateurs dans le stade étaient stupéfiaient.[19]
L’Abattement
La défaite choquante provoqua de nombreuses réactions après le match qui démontre l’ampleur de la désillusion. Après le coup de sifflet final, un supporter bouleversé se suicidé, et trois autres sont morts d’une crise cardiaque.[20] La FIFA décerna le trophée Jules Rimet à l’Uruguay sans cérémonie de remise des prix[21]—personne n’avait préparé de discours de félicitation pour l’Uruguay. À l’extérieur du stade, un groupe de supporters brésiliens renversèrent un buste d’Angelo Mendes de Moraes, maire de Rio critiqué à cause de ses félicitations prématurées.[22] Selon la rumeur , Flavio Costa, entraîneur de l’équipe brésilienne, sortit discrètement du stade déguisé en nounou.[23] L’échec aussi influençait l’équipe brésilienne elle-même, qui ne jouait pas de matchs pendant les deux années qui suivirent la défaite et ne jouait pas au Maracanã pendant les quatre années suivantes.[24] La conséquence la plus visible de la défaite était le fait que l’équipe nationale a adopté par la suite un maillot jaune et vert à la place du maillot blanc qu’elle avait porté pendant le Mondial.[25]
Offert par Keystone-France/Getty.
L’équipe Brésilien de 1950 avec les maillots blancs
Offert par Bildbyrån.
L’équipe uruguayenne de 1950
Les Dégâts psychologiques
La défaite avait aussi un effet émotionnel et psychologique pour le peuple brésilien et pour leur société en général. Le match final, surnommé le « Maracanazo », est considéré une tragédie nationale,[26] parfois comparé avec le bombardement d’Hiroshima et les attentats du 11 septembre 2001.[27] Le Maracanazo était particulièrement tragique parce que tout le monde au Brésil—et une grande partie du monde—suivait le Mondial. Les Brésiliens étaient émotionnellement investis dans leur équipe et, par conséquent, le pays entier a souffert à cause de la défaite. Le Maracanazo était aussi tragique parce qu’il a entravé les efforts du Brésil à démontrer qu’il était un pays vénérable qui mérite le respect et l’admiration de ses pairs.[28] La conséquence la plus sévère du Maracanazo était sans doute le fait qu’il a provoqué un manque de confiance en soi du peuple brésilien.[29] Aldo Rebelo, ministre de sport du Brésil, suggère que « Losing to Uruguay in 1950 not only impacted on Brazilian football. It impacted on the country’s self-esteem ».[30] Le Brésil était effectivement paralysé émotionnellement et psychologiquement à cause du Maracanazo.[31]
Le Football et l’identité brésilienne
Alex Bellos, auteur britannique et expert au football brésilien, suggère que la défaite était particulièrement blessante parce que le football est inextricablement lié à l’identité brésilienne. Pour vraiment comprendre ce lien, il faut considérer l’histoire du Brésil comme participant clé à la traite d’esclaves.[32] De 1502 à 1860, le Brésil était l’importateur le plus grand d’esclaves ; pendant ce période, 38 pour cent des esclaves apportés au Nouveau Monde allaient spécifiquement au Brésil, où ils travaillaient principalement pour cultiver et moissonner du sucre.[33] En 1888 le Brésil était le dernier pays dans l’hémisphère occidental d’interdire l’esclavage.[34] Au début du 20ème siècle, c’était commun d’accuser les brésiliens noirs pour les problèmes de la société. Toutefois, pendant les années 30, certains footballeurs noirs qui étaient particulièrement doués et élégants sur le terrain sont devenus héros nationaux et, par conséquent, ils ont encouragé leurs compatriotes d’apprécier plus la diversité de leur pays. Depuis les années 30, le football servait d’unifier le Brésil.[35]
Offert par Guardien Football (youtube)
Une vidéo (en anglais) qui a des entrevîtes avec les joueurs qui faisaint partie du Maracanazo
Le Victime
Moacir Barbosa, gardien de l’équipe brésilienne, souffrait le plus en conséquence de la défaite tragique. Comme gardien, il devait subir éternellement les reproches des Brésiliens qui l’accusaient d’avoir perdu le match. Il était souvent vilipendé par ses propres compatriotes. De plus, les supporters des équipes adverses se moquaient de lui.[36] Comme Barbosa était noir, le racisme imprégnait souvent les critiques qui étaient donc encore plus blessantes. Malgré le fait que nombreux footballeurs admirés au Brésil étaient noirs, comme Didi et Léonidas da Silva, la situation difficile de Barbosa démontre que la société brésilienne des années 50 était « encore marquée par le racisme, presque une ségrégation façon apartheid ».[37]
Même les membres des équipes nationales successives rejetaient Barbosa. En 1994, Barbosa voulait encourageait Cláudio Taffarel, le gardien à cette époque-là, avant un match qualifiant contre l’Uruguay. Cependant, Mário Zagallo, entraîneur superstitieux de l’équipe, a interdit le rencontre entre les deux hommes.[38] Un peu avant sa mort, Barbosa a exprimé son exaspération face à sa situation peu enviable: « Under Brazilian law, the maximum sentence is 30 years. But my imprisonment has been for 50 years ».[39] La tradition orale au Brésil suggère que Barbosa a cherché sa consolation quand il a brûlé des poteaux de but de la Maracanã à un barbecue.[40] Bien que c’était surtout une consolation symbolique plutôt qu’une vraie consolation, la consolation symbolique est mieux que rien du tout.
Le Mondial de 2014: la rédemption ou la réforme?
L’été passé, le Maracanazo préoccuperait beaucoup de Brésiliens pendant le Mondial. C’est raisonnable d’imaginer qu’une victoire, spécialement de l’Uruguay ou de leur adversaire l’Argentine, permettrait au Brésil de vaincre la mémoire douloureuse du Maracanazo. Le Mondial en 2014 a donné Brésil une autre opportunité de gagner le Mondial dans le Maracanã et de démontrer à tout le monde la gloire du pays.[41] En plus, une victoire brésilienne n’était pas au dehors le champ des possibilités. Après avoir gagné la Coupe des confédérations au Maracanã en 2013, l’équipe nationale du Brésil est devenue le favori de beaucoup de personnes qui conjecturent le résultat du Mondial.[42] Rebelo, ministre de sport brésilien, constatait que la compétence technique et la créativité des footballeurs brésiliens leur donnerait un avantage sur ses adversaires européens, qui jouent d’une manière tactique et de force brutale.[43]
Bien que le Brésil croisa les doigts pour une victoire pour qu’il puisse effacer l’embarras de 1950, certains individus ont suggéré qu’une défaite est un effet positif sur le football brésilien.[44] Une enquête parlementaire au Brésil a découvert que les meilleurs footballeurs brésiliens sont vendus aux clubs européens au détriment des équipes brésiliennes, que les clubs brésiliens sont pratiquement en faillite, et que l’argent généré par le football serve d’enrichir un petit groupe d’individus qui sont déjà riches.[45] Sócrates, star brésilien des années 70 et 80, avant la coupe, à suggéré qu’une défaite gênante au Mondial peut inciter la Confédération brésilienne de football de se reformer, de se démocratiser, et de réduire la corruption.[46] Selon Rebelo, un défaite aux mains de l’Argentine serait la tragédie ultime, « like losing to your brother-in-law and that is something that you also can never accept in the family ».[47] Heureusement, les Allemands l’ont sauvé de cet tragédie. Mais alors qu’une défaite désastreuse a passait, il faut attendre et voir si ces réformes vont arriver.
En conséquence de la mémoire douloureux de la Maracanazo, c’est donné que la tragédie de 1950 préoccupera les Brésiliens toujours. C’est essentiel pour les étrangers de connaître l’histoire du Maracanazo et de comprendre ses conséquences psychologiques sur le pays entier pour qu’ils puissent vraiment apprécier l’importance du Mondial au Brésil et le rôle du Brésil comme pays organisateur. Le Mondial l’été passé c’était plein de symbolisme profonde, et c’était tout ce qu’il faut pour avoir un Mondial fascinant.
[1] Joshua Robinson, “The Defeat that Brazil Can’t Forget,” Wall Street Journal, Nov. 4, 2013, www.online.wsj.com/news/articles/SB10001424052702304682504579154172398189230.
[2] “1950 World Cup: Germany is excluded from a new beginning,” Continental AG, 2010, www.conti-online.com/generator/www/de/en/continental/contisoccerworld/themes/00_fifa_wm_2010/55_dfb_stars/16_dfbstar_1950_ohne_dfb_en.html.
[3] Robinson.
[4] Vladimir Hernandez, “World Cup 2010: Underdogs Uruguay hunt third cup,” BBC, July 1, 2010, www.news.bbc.co.uk/sport2/hi/football/world_cup_2010/8781362.stm.
[5] Hernandez.
[6] “Uruguay triumph brings heartbreak for Brazil,” FIFA, http://www.fifa.com/worldcup/news/y=2007/m=3/news=uruguay-triumph-brings-heartbreak-for-brazil-502075.html
[7] Robinson.
[8] Ibid.
[9] Ibid.
[10] Ibid.
[11] Julia Dias Carneiro, “Delays in Brazil’s 2014 World Cup works recall 1950,” BBC, Oct. 29, 2011, www.bbc.co.uk/news/world-latin-america-15461320.
[12] Ibid.
[13] Ibid.
[14] FIFA.
[15] Robinson.
[16] Ibid.
[17] Ibid.
[18] Ibid.
[19] FIFA.
[20] Continental.
[21] Ibid.
[22] Ibid.
[23] Ibid.
[24] Ibid.
[25] Hernandez.
[26] Carneiro.
[27] Kirsty Lang, “Doctor with cure for Brazilian football,” BBC, June 1, 2002, www.news.bbc.co.uk/2/hi/programmes/from_our_own_correspondent/2018994.stm.
[28] Alex Bellos, “Countdown to World Cup 2014: Brazil desperate to exorcise the 1950 ghost,” The Guardian, June 11, 2013, www.theguardian.com/football/blog/2013/jun/11/world-cup-brazil-1950-hosts.
[29] Ibid.
[30] Mike Collett, “Soccer-Brazil must not repeat 1950 World Cup ‘tragedy’,” Reuters, Dec. 3, 2012, www.uk.reuters.com/article/2012/12/03/soccer-brazil-minister-idUKL4N09D2VI20121203.
[31] Continental.
[32] Bellos.
[33] Christian Gestewicki et al., “The Brazilian Slave Trade,” The African Slave Trade in the Atlantic World, www.public.gettysburg.edu/~tshannon/hist106web/site2/BRAZIL.HTM.
[34] Bellos.
[35] Ibid.
[36] Robinson.
[37] Serge Katembera Rhukuzage, “La malédiction du gardien noir au Brésil,” Carioca Plus, Oct. 24, 2013, www.peacefulworld.mondoblog.org/2013/10/24/la-malediction-du-gardien-noir-au-bresil/.
[38] Continental.
[39] Robinson.
[40] Ibid.
[41] Collett.
[42] Avi Creditor, “1950 Uruguay ghost haunts Brazil in commercial,” Sports Illustrated, Nov. 22, 2013, www.soccer.si.com/2013/11/22/1950-uruguay-ghost-haunts-brazil-in-commerical/.
[43] Collett.
[44] Lang.
[45] Ibid.
[46] Ibid.
[47] Collett.
Comment citer cette page: “Le Maracanazo: une tragédie brésilienne et le Mondial de 1950,” Écrit par Matthew Schorr (2013), World Cup 2014, Soccer Politics Blog, Duke University, http://sites.duke.edu/wcwp/world-cup-2014/world-cup-2014-fan-guide/francophone-version/le-mondiale-en-1950-une-tragedie-bresilienne/ (accessed on (date)).
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