Quelle est la véritable étendu du dopage dans le football russe?

Sepp Blater ferme l’oeil sur le dopage?

Comme nous l’avons vu dans notre page sur la position de la FIFA, le dopage dans le football ne semble pas, officiellement, très répandu. La FIFA assure que ses tests sont infaillibles et que le foot est un sport propre. Sepp Blater, son président de 1998 à 2015, affirmait même que « les footballeurs n’ont absolument rien à gagner » en prenant des produits dopant. [1] L’une des raisons de cette faible association entre l’utilisation de drogues améliorant la performance et le sport est due au manque de preuves. Une collaboration et des recherches plus approfondies semblent nécessaires en ce qui concerne les substances interdites, les méthodes de détection et la collecte de données dans le monde entier.

En effet, de façon générale, on peut se poser des questions sur l’étendu du dopage dans le football face aux enjeux économiques. Il est vrai que le football est d’abord un sport technique, qui requiert une excellente touche de balle, de la précision dans la transmission du ballon et une intelligence du jeu par rapport aux tactiques et aux positionnements. Ces qualités ne peuvent pas être améliorer grâce au dopage. Cependant, il est indéniable que le football demande aussi un excellent physique notamment au niveau cardiovasculaire et musculaire. L’étude de Malcolm et de Waddington qui suit [1], explore les méthodes de dopage mises à jour dans le football qui laissent à penser de ce que pourrait être la réalité du dopage en Russie. Les résultats de cette étude couplés aux découvertes faites autour des Jeux Olympiques de Sotchi (développés ici) éclairent la situation d’une façon assez complète.

Tout d’abord, il faut noter que de part la nature illégale de la prise de produit dopant, il est difficile d’obtenir beaucoup de données sur l’étendue de leur utilisation. En utilisant les réponses à des questionnaires, le témoignage d’athlètes, la recherche faite par les gouvernements et les résultats de tests, les chercheurs D. Malcolm et I. Waddington ont poussé l’étude plus loin que la FIFA. La mise en place par des clubs ou des gouvernements de programmes organisés de dopage est bien plus problématique que des cas de dopage individuel car ils impliquent un nombre plus important d’athlètes et bien souvent aussi des pharmacologistes ou scientifiques dont la tâche est d’obtenir les drogues façon discrète de telle sorte que le système perdure. En étudiant toutes ces données, Malcolm et Waddington cherchaient donc surtout à identifier des programmes organisés.

L’analyse des résultats des tests montre d’emblée l’existence de courtes périodes où plusieurs athlètes sont contrôlés positifs. Par exemple, entre avril et octobre 1997, cinq joueurs français de ligue 1 ont été testés positifs à des stéroïdes anabolisants[1]. De même, au début des années 2000, quelques joueurs de l’équipe nationale des Pays-Bas ont été testés positifs au nandrolone[1], créant des suspicions que l’équipe néerlandaise ne dope ses joueurs avec cette substance. Partant du postulat que le nombre de joueurs attrapés ne représente que la partie visible de l’iceberg, les chercheurs approfondissent leur étude grâce à des témoignages. De nombreux joueurs tels que Emmanuel Petit, Gianluca Vialli… ont avoué qu’ils connaissaient des joueurs qui se dopent [1]. Arsène Wenger, l’entraîneur d’Arsenal, a aussi noté que certains joueurs rejoignant le club avaient des taux de globules rouges anormalement élevés, ce qui pourrait révéler l’utilisation d’EPO, une hormone utilisée pour augmenter l’endurance et la performance[3][2]. D’autres footballeurs à la retraite, tel JJ. Edelie assurent qu’un seul joueur de l’OM ne prenait pas de produits dopants au début des années 1990, fait surprenant car seul Christophe Dugarry a été contrôlé positif, et cela plusieurs années plus tard. En Russie, il a été révélé que le club Spartak de Moscou avait un programme de dopage organisé: lorsqu’un joueur a été  testé positif, deux anciens du club ont avoué avoir participé au programme. De même, dans le livre de G. Oxenham « Under the Lighs and in the Dark », la joueuse Dani Foxhoven raconte avoir été, dans son club russe FC Energy Voronezh, dopée de force aux stéroïdes sous couvert d’apport vitaminique. Il semble que cela soit une pratique généralisée dans le football féminin russe[4].

Dani Foxhoven, dopé de force lors de son passage

au FC Energy Voronezh, en Russie.

Sachant que le football masculin représente des enjeux économiques bien plus importants que le football féminin, il semble très probable que ce type de dopage soit aussi généralisé dans les clubs masculins. En analysant les résultats d’enquêtes d’état, notamment au sein de la Juventus de Turin, Malcolm et Waddington montrent l’importance des médicaments pour le club. Lors d’une visite de contrôle, 281 substances pharmacologiques sont découvertes[1][]5. Bien que la plupart d’entre elles soit légale, le nombre et la quantité de produits sont choquantes. Il semblerait que les joueurs soient malades très fréquemment… ou qu’il prennent des médicaments afin d’améliorer leurs performances sans justification. Plus tard dans l’investigation, suite à la fouille par la police d’un laboratoire anti-dopage, il est découvert qu’il n’a pas testé les joueurs pour certains stéroïdes et hormones. Les membres du laboratoire avaient aussi reçu l’ordre de ne pas révéler les tests positifs. Et finalement, les documents du laboratoire indiquaient des taux d’hématocrites très élevés chez 24 joueurs de Parme, un signe révélateur de l’utilisation d’EPO [1].

Malcolm et Waddington discutent finalement du peu de contrôles positifs en Angleterre. Les deux raisons avancées pour expliquer les différences de niveau de dopage entre pays sont « la médicalisation de la vie sociale et du sport en particulier et l’augmentation de la compétitivité du sport » (dé-amateurisation, politisation, et commercialisation). Si l’on compare ces raisons à la situation du sport en Russie, il est évident que le sport y est très médicalisé et très compétitif de par l’histoire de l’Union Soviétique. Donc tous ces éléments corroborent le fait que le football russe ne soit pas propre.

 

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Source:

[1]Malcolm, Dominic, and Ivan Waddington. “’No Systematic Doping in Football’: A Critical Review.” Soccer and Society, vol. 9, Taylor and Francis, 2008, pp. 198–214.

[2]Dhers, Gilles. “Wenger Parle De Dopage «à L’insu» Des Joueurs.” Libération.fr, Libération, 9 Oct. 2004, www.liberation.fr/sports/2004/10/09/wenger-parle-de-dopage-a-l-insu-des-joueurs_495354.

[3]“La Grande Saga De L’EPO.” Accueil, www.doctissimo.fr/html/forme/mag_2000/mag2306/fo_1895_epo_depistage.htm.

[4]“Excerpt: Untold Stories of Women’s Soccer.” SI.com, www.si.com/soccer/2017/10/25/untold-stories-womens-soccer-excerpt-danielle-foxhoven-russia.

[5]Endrizzi, Luca, and Giorgio Perottino. “« On N’a Pas Trouvé D’EPO à La Juve, Mais Une Pharmacie Bien Fournie ».” SOFOOT.com, www.sofoot.com/on-n-a-pas-trouve-d-epo-a-la-juve-mais-une-pharmacie-bien-fournie-439282.html.