Le bureau d’enregistrement du comté de Deux-Montagnes

Le site internet du Registre foncier du Québec donne accès à une énorme quantité  de titres notariés (et autres) associés à l’immobilier dans la province. Cela inclut évidemment les ventes et donations de lots, mais également plusieurs contrats de mariage et testaments.

L’histoire officielle de ce registre suggère qu’il devrait être complet depuis 1841. Les premiers titres spécifiques au bureau d’enregistrement du comté de Deux-Montagne  (le Registre B) ne remontent cependant qu’à juin 1857. La première tranche d’actes se trouve plutôt au comté d’Argenteuil. À sa création (p .334), le bureau d’enregistrement de St-André (d’Argenteuil) fut en effet donné la responsabilité des deux seigneuries. Ce n’est qu’en 1857 que la responsabilité fut divisée, un bureau déménageant à Ste-Scholastique et l’autre à Lachute (p. 5). Le registre principal (le Registre BB), par contre, est demeuré à Argenteuil, où il est toujours indexé.

Certains actes manquent néanmoins aux registres. Par exemple, la vente de Jean-Baptiste Charbonneau à Samuel Charbonneau (lot 869 au terrier des Sulpiciens) le 19 juillet 1876, devant Melchior Prévost, n’a pas été enregistrée. Un bordereau de vente (No 20141 au Registre B) devant notaire confirme la transaction, a posteriori, au printemps 1896. Le système n’est donc pas sans faille.


En créant un compte au Registre foncier du Québec, il est possible d’obtenir la chaîne de transactions associées à un lot et de lire les actes correspondants de la fin du 19e siècle à nos jours.

Il faut tout d’abord identifier le numéro du lot, tel que défini au Complément du plan officiel de la paroisse (e.g., St-Jérôme, Ste-Monique, Ste-Scholastique et village)Ensuite, en appuyant sur l’onglet Consulter, puis sélectionnant l’Index des Immeubles, on obtient le formulaire suivant.

(Le lot 10 de la Paroisse de Saint-Jérôme contenue dans le comté de Deux-Montagnes correspond au lot 908 du terrier des Sulpiciens.) On obtient alors le document qui suit.

La colonne à l’extrême gauche rapporte le numéro d’enregistrement de l’acte concerné. Pour obtenir une copie de cet acte, il faut appuyer sur l’onglet Consulter, puis sélectionner Actes, radiations, avis d’adresse. On obtient alors le formulaire suivant.

Le résultat de la recherche apparaît en second lieux. De ce qui a été numérisé pour Deux-Montagnes, un seul acte porte l’inscription 5881 et il se trouve au Registre B. Appuyer sur Soumettre donne alors le texte de l’obligation de Jean Baptiste Charbonneau envers Robert Langdell.

Les transcriptions incluent souvent une référence à une quittance en marge du texte. La numérotation de ces radiations est toutefois distincte de celle des actes, et le registre qui les contient n’a pas (encore) été numérisé.

L’index des immeubles ne contient pas toujours l’entièreté de l’historique des titres enregistrés depuis la création cadastre en 1860, malgré ce que suggère les sources officielles. Pour le lot 29 de la paroisse de St-Jérôme, par exemple, l’index débute en 1900. L’acte de 1868 enregistré sous le numéro 6134 (au Registre B) n’y est pas mentionné.

Afin d’extraire davantage d’information du registre foncier, il faut consulter l’index des noms. Jusqu’à la fin du 20e siècle, ce registre était disponible sur papier uniquement, mais les multiples volumes qui l’abritent ont depuis été numérisés. Pour les consulter, il faut appuyer sur l’onglet Consulter, puis sélectionner Index des noms/Zonage agricole pour obtenir le formulaire suivant.

Cette recherche est un peu plus difficile à maîtriser, mais les tableaux ci-bas, qui listent les volumes pertinents pour la période pré-1914, aident à y voir plus clair. Tout n’est pas simple pour autant. En plus des registres d’Argenteuil,  il faut considérer les volumes supplémentaires 9990X, qui couvrent des périodes apparaissant déjà à la série régulière. Pour l’instant, la raison pour cette superposition demeure mystérieuse, tout comme le système de numérotation des actes au volume 99903 de Deux-Montagnes.

Argenteuil

No volume Date début Date fin Nom début Nom fin
1 1842-01-01 1869-12-31 A Z
2 1854-01-01 1877-12-31 A W
99901 1834-01-01 1838-12-31 A W
99902 1834-01-01 1838-12-31 B W
99903 1842-01-01 1867-12-31 A Z

Deux-Montagnes

No volume Date début Date fin Nom début Nom fin
1 1857-01-01 1866-12-31 A Z
2 1866-01-01 1874-12-31 A Y
3A 1874-01-01 1914-12-31 A L
3B 1874-01-01 1914-12-31 L W
99901A 1882-01-01 1901-12-31 A L
99901B 1882-01-01 1901-12-31 L W
99902 1902-01-01 1914-12-31 A Y
99903 1883-01-01 1886-12-31 A W

De cette manière, on peur localiser au volume 2 l’entrée pour l’acte No 6134 (au Registre B), qui fait référence à une transaction entre Jean Baptiste Charbonneau, père, et Jean Baptiste Charbonneau, fils, sur un lot situé dans la paroisse de St-Jérôme. Toutefois, le travail nécessaire pour identifier les actes pertinents sans autre information est fastidieux et peut nécessiter plusieurs essais et erreurs.


Le coût de chaque consultation au registre foncier est de 1$. Ce ticket modérateur limite la possibilité d’atteintes massives à la vie privée. Et puisque les principaux utilisateurs de ce service sont les notaires, leurs clients absorbent aisément ce modeste coût. Pour la recherche historique et généalogique, par contre, ce ticket modérateur est un obstacle plus sérieux. Le volume d’actes à consulter dans ces situations peut en effet être important. Suivre les allers-retours de ma famille sur le rang Ste-Marie, par exemple, a coûté plus de 50$.

Sachant que la BAnQ a numérisé une quantité remarquable d’actes notariés des 18e et 19e siècles et que l’Univers culturel de St-Sulpice est à la recherche d’un financement pour numériser leurs terriers et de les rendre accessible à tous, ce tarif semble aller à contre courant. Même le terrier de Domptail Lacroix se détaille pour moins de la moitié de ce montant par page. Une solution mitoyenne serait d’éliminer toute charge pour la consultation d’actes de plus de 100 ans. Même une fenêtre de 120 our 150 ans serait plus raisonnable que le système actuel. Mais à qui se plaindre?


Je tiens à remercier chaudement ma belle-mère notaire et MG Vallières de m’avoir guidé à travers différentes étapes de cet apprentissage. Les erreurs et opinions demeurent néanmoins ma responsabilité entière.

 

Le Terrier: autres leçons

Voici, en vrac, quelques leçons apprises du Terrier de la Seigneurie du Lac-des-Deux-Montagnes.

  • Comme toutes les autres resources cadastrales, le Terrier contient plusieurs erreurs de nom, date, notaire ou autres, en plus d’omettre certaines transactions. La superposition des resources permet souvent de résoudre les conflits. Les quittances, inventaires, transactions suivantes, etc. deviennent alors particulièrement importants.
  • L’ensaisinement (au sens de leur enregistrement auprès des Seigneurs) des actes peut parfois avoir lieu plusieurs années (voire décennies) après la signature des actes eux-mêmes. Les Seigneurs n’avaient donc apparemment pas accès à un instantané de l’identité des leurs tenanciers.
  • Sans surprise, les notaires Girouard et Raizenne ont traité un bon nombre de transactions sur les terres de cette seigneurie. Le Terrier est donc un outil essentiel pour tenter de reconstruire leurs greffes.
  • Certains lots ont été transmis par règles de succession de base, sans aucun acte notarié. Le lot 871, par exemple, a changé de main plusieurs fois entre 1814 et 1849, sans laisser aucune trace notariale. Le Terrier, heureusement, offre la séquence de transmissions et quelques explications. En couplant celles-ci à l’information généalogique traditionnelle, on peut alors reconstruire une chaîne de transmission plus ou moins exacte.
  • Les emplacements ne semblent pas intéresser les Seigneurs. Seules les transactions sur de grands pans d’un lot ont été ensaisinées.
  • D’autres suivront certainement.

Cartes des côtes étudiées

Une collègue m’a récemment demandé d’inclure “un plan, ou le lien d’un plan, ou une légende commentée” avec les côtes que j’étudie. Voici donc une première ébauche des côtes de la paroisse de Ste-Scholastique, de la côte Ste-Marie et de la Grande Côte de Ste-Thérèse. Pour cette dernière le plan cadastral que j’ai à ma disposition pour l’instant est de trop basse résolution pour capturer tous les détails de l’organisation des terres (et cette organisation est insuffisamment régulière pour en inférer la structure). J’espère obtenir éventuellement une nouvelle copie de ce plan (ou d’un autre) et que la reconstruction des chaînes de titres éliminera les dernières zones d’incertitude.

Complément du plan officiel de la paroisse de Sainte-Scholastique, comté des Deux-Montagnes. Notation utilisée: Côte St-Louis (rouge), Côte St-Joachim (bleu); Belle-Rivière — première concession (vert).
Agencement des compléments des plans officiel de la paroisse de Saint-Jérôme et de Sainte-Monique, comté des Deux-Montagnes. Ouest (jaune) et est (mauve) de la côte Ste-Marie. La séparation entre les deux paroisses est donnée par la ligne rouge.
Portion de la carte du comté de Terrebonne dans la province de Québec. La partie de la Grande-Côte de Ste-Thérèse du seigneur Janvier Domptail Lacroix est indiquée en turquoise.

Perspective historique sur Belle-Rivière

L’article de Germain Lalande (ici, en famille) intitulé Belle-Rivière et ses moulins (Cahiers d’histoire de Deux-Montagnes 3 (4), 60-74 (1980)), sur lequel j’ai récemment mis la main, s’avère être utile pour comprendre l’origine et l’évolution des divers moulins dans cette partie de la seigneurie et pour reconstruire le terrier de la première concession de Belle-Rivière. Il fournit, par ailleurs, une explication de l’évolution de la toponymie de la côte St-Joachim:

Belle-Rivière s’appelait, à l’origine, “Côte Saint-Joachim”. Cette côte comprenait alors non seulement les terres de l’actuelle côte Saint-Joachim, mais encore tout le territoire adjacent sur les deux rives de la rivière de ce nom, jusqu’à la limite sud du village de Sainte-Scholastique. Ce n’est que plus tard que cette dernière partie s’appellera Belle-Rivière. Cette appellation sera également donnée a la partie située au nord du village et dont les terres sont également basées sur la rivière en question […].

Développement de la seigneurie

Évolution temporelle des concessions de la Seigneurie du Lac-des-Deux-Montagnes. Source: Dépatie et al. Contributions à l’étude du régime seigneurial canadien, Hurtubise (1987), p. 208.

Dans sa contribution à l’étude du régime seigneurial canadien, Christian Dessureault produit cette magnifique carte de l’évolution des concessions de la Seigneurie du Lac-des-Deux-Montagnes. Les greffes de notaires qui correspondent à ces différents groupements de terres ne sont pas tous encore disponibles en ligne, mais la consultation du terrier des MM de St-Sulpice a grandement simplifié la recherche originale de Dessureault.

EZAIM

Carte 4.02 de l’Atlas EZAIM (DANSEREAU, P., CLIBBON, P. B., & PARÉ, G. (1975). Atlas EZAIM. Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal.)

La création de l’aéroport de Mirabel a été accompagnée de l’étude écologique de la zone de l’aéroport international de Montréal (EZAIM). Avec ses huit volumes et son atlas, EZAIM est un effort monumental. Cette synthèse fut dirigée par l’écologiste de renom, Pierre Dansereau. L’atlas au 1:50 000 contient des dizaines de cartes couvrant l’irrigation, la production agricole, la toponymie, la faune et j’en passe. Elles sont dérivées d’autant de rapports. Celles sur les maisons de pierres et les clôtures, par exemple, résument l’analyse des roches en place. Consulter des travaux, par contre, n’est pas simple. On peut trouver  l’atlas à la BANQ et dans  quelques autres bibliothèques, dont celle de UNC à Chapel Hill! Malheureusement, personne n’a encore colligé l’information et créé une version géomatique de l’ouvrage.

Nouvelles ressources archivistiques

En feuilletant le mémoire de maîtrise de Christian Dessurault (aussi publié par la suite), j’ai remarqué qu’il cite abondamment la source suivante: Contrats de concession et Livres-Terriers au Lac des Deux-Montagnes, ASSM, armoire 4, cartons 1 à 17 et procure du Séminaire, où ASSM dénote les Archives du Séminaire de Saint-Sulpice de Montréal.
Si je comprends bien, une partie de ces archives du séminaire ont été transférées sur microfilms et l’UdeM et la BANQ (et ici) en auraient des copies. Par contre, je ne suis pas certain s’il s’agit des mêmes documents aux deux endroits ou même si l’une ou l’autre des collections contient le livre terrier ou les contrats de concession de de la Seigneurie du Lac des Deux-Montagnes .
L’auteur rajoute, par contre, (p. 111, note 13):
Dans les Livres Terriers de la seigneurie, les dates de la vente ou de l’échange et de l’ensaisinnement sont souvent données. Or, nous avons pu remarquer que l’ensaisinnement vient souvent cinq ou dix ans après la vente ou l’échange d’une terre, quelque fois vingt ans.
Je ne sais donc pas si cette ressource pourra être d’une quelconque aide pour reconstruire le cadastre, mais ça vaut certainement la peine d’y jeter un coup d’oeil.
Les procès-verbaux des Grands-Voyers sont une autre trouvaille qui ressort de ce mémoire. Le Grand-Voyer “fixe les règles de la construction des chemins conformément aux requêtes communes que lui en font les habitants d’une même côte. […] Les premiers procès-verbaux sont de 1793. Ils concernent la construction de chemins de base et de chemins de liaison sur  toutes les côtes de la partie méridionale de la seigneurie, des côtes Saint-Vincent et Saint-Joachim […].” (p. 131, note 65). Cette ressource semble être disponible à la BANQ du Vieux-Montréal.
Quelques autres perles de référence ressortent aussi de ce travail:  (i) l’analyse géographique d’une partie de ce territoire avant l’établissement de l’aéroport de Mirabel et (ii) la mention que “En 1806, le notaire Joseph Turgeon du bourg de Terrebonne prend en une seule concession une prairie de 480 arpents de terre située au nord de la côte Sainte-Marie.” (p. 136) illumine un peu plus l’origine de cette prairie.

Définition de la Côte St-Joachim

La demande d’annexion de la part des habitants de la Côte Saint-Joachim à la paroisse de St-Benoit, datée du 14 février 1798, contient non seulement une liste des propriétaires concernés, mais aussi une définition de ce qu’est la dite côte:

(Entendu par la Côte St-Joachim toutes les terres anciennement arpentées et bornées par [cur?] Jos. Papineau dans le haut de la rivière du Chêne et dont il a passé les titres de concession et les terres qui répondent du côté du sud-ouest bornés par [aur?] louis qui sous la dénomination de Belle-Rivière[.)]

Ressources générales à consulter sur St-Scholastique et la seigneurie de Deux-Montagnes

  • Histoire de paroisse de Sainte-Scholastique pour le 150e (1975) et 15 ans plus tard (1990).
    • Mise à jour 22 décembre 2017: Le contenu du premier volume, produit pour le 150e anniversaire de la paroisse est essentiellement tout absorbé dans celui du second et est donc redondant. Le second offre un bon survol de l’histoire de la paroisse et inclut quelques histoires de familles.
  • Mariages de la paroisse de Sainte-Scholastique.
  • Histoire du territoire de la seigneurie.
    • Mise à jour 22 décembre 2017: Le document est en réparation à la BAnQ. Il faut attendre son retour pour le consulter.
  • Mémoires de maîtrise sur: (i) l’ histoire de la seigneurie et son peuplement datant de (ii) 1955 et de (iii) 1980, (iv) la géographie du comté du Deux-Montagnes et (v) ici.
    • Mise à jour 22 décembre 2017: (i) a été copié et est en cours d’analyse; (ii)  (iv) et (v) n’ont pas encore été consultés; (iii) considère les recensements et les registres paroissiaux pour détecter les avancées démographiques. Ça fournit plus à lire et à considérer.
  • Et d’autres…

Augustin Dumouchel

Depuis cette semaine, le greffe du notaire Augustin Dumouchel est enfin disponible en format électronique sur le site de la BANQ. Cette avancée devrait permettre de remplir quelques trous, ici et là, dans les cadastres de la région. C’est à suivre…